À propos de l'auteur : Diane Précourt

Catégories : Tourisme

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La Chaire de tourisme Transat-UQAM vient de dévoiler les résultats d’un sondage effectué auprès de 1000 voyageurs québécois afin de dégager les tendances qui se dessinent pour 2024, et assurément à plus long terme.

Diane Précourt

De tout temps, épousant la nature même de ce segment de l’activité humaine qu’est le tourisme, les types de voyageurs se sont avérés multiples. Mais les modes de vie en perpétuel mouvement engendrent aussi leurs propres modèles qui collent aux changements de l’heure. Parmi les tendances qui se dessinent pour 2024, et assurément à plus long terme, se classe le « voyageur caméléon », selon les résultats d’un sondage effectué auprès de 1000 Québécois par la Chaire de tourisme Transat-UQAM, dévoilés il y a quelques jours. Dégageons quelques grandes orientations.

Dans le secteur touristique comme ailleurs, la pandémie s’est bien jouée des codes traditionnels, faisant naître une formule hybride de voyages. Certes, il est courant qu’à un déplacement professionnel s’ajoutent des congés personnels, mais on assiste maintenant à la situation inverse. Ainsi, le boulot s’immisce de plus en plus dans les choix … de vacances, créant le mot-valise « travacances » (workation).

D’où ce voyageur caméléon qui prolonge un séjour de plaisir par du télétravail, profitant du même coup de certains avantages, comme ces gens qui optent pour le hors-saison – en progression chez 59 % des répondants, dont 30 % pour leurs vacances annuelles – afin de bénéficier de réductions à la clé. Ne sont pas en reste dans le portrait les employés en mal de présentiel et coupés de contacts humains, qui pratiquent le bleisure, de business + leisure.

Le bonheur dans l’ailleurs

Le tourisme de bien-être, de son côté, poursuivra sa croissance dans une proportion moyenne annuelle de plus de 16 % jusqu’en 2027, prédit-on, ce qui le range au-delà des performances mêmes de cette industrie. Les Québécois sont friands de ce mode d’évasion, obnubilés par une quête du bonheur étroitement liée au rôle important qu’ils accolent au voyage pour leur santé mentale. Plus qu’une pure dépense, ils le considèrent comme un investissement antistress. Et prioritaire.

Ainsi, près de la moitié des personnes sondées ne se disent guère freinées par le difficile contexte économique actuel, s’inscrivant dans la notion du voyage jugé comme un besoin. Même le luxe fait bonne figure dans l’échelle de leurs aspirations, un luxe non point réservé aux plus fortunés. On souhaite vivre une expérience unique, quitte à rogner le budget au quotidien ou à sacrifier des attraits à destination.

Cela dit, nul n’est insensible à une hausse généralisée des coûts, qui reste une préoccupation importante même chez les gens aisés. D’après le sondage, « plus d’un voyageur québécois sur trois (36 %) mentionne qu’il passera plus de temps à magasiner pour dénicher de bonnes affaires ». Les attentes quant au rapport qualité-prix sont élevées. On en veut pour son argent, et plus, préférablement, obligeant les entreprises à faire preuve de trésors d’imagination.

Le voyageur (ir)responsable

Vrai que l’empreinte carbone de l’industrie touristique est souvent montrée du doigt, elle qui repose sur le transport, la consommation énergétique et la surproduction de matières résiduelles, des enjeux intimement liés au réchauffement climatique. Si les intentions des Québécois sont des plus louables s’agissant de l’environnement, il y a loin de la coupe aux lèvres pour que leur bonne conscience les fasse passer à l’action.

Selon l’enquête de la Chaire, 60 % des répondants souhaitaient déjà voyager de façon plus écologique en 2021. Depuis trois ans, toutefois, « aucun changement n’est observé quant à la proportion de voyageurs québécois qui adoptent certains comportements écoresponsables ». Bonjour le choc entre l’intention, le budget et la vertu. De plus, comme souligné dans une précédente chronique, les jeunes de 18-34 ans sont sous-représentés parmi les « vertueux ». Et puis basta pour la planète, doit-on en conclure…

L’effet météo, naturellement

Dans le giron des bouleversements climatiques, la météo joue allègrement les trouble-fête pour les touristes. Les événements extrêmes qui ont frappé le Québec en 2023 – « feux de forêt, épisodes de pluie verglaçante, inondations, vagues de chaleur, tornades » – ont des répercussions sur l’humeur collective, le stress financier et psychologique, la dépression, et l’un des corollaires qu’est la planification de voyage. Et ce n’est là que pâle reflet de ce qui nous attend. Des spécialistes cités par la Chaire mentionnent que « [les événements extrêmes] seront plus fréquents et surtout plus forts, plus soudains et plus soutenus ». Résultats : reports de dates, réductions de séjour, changements de destination au Québec ou à l’étranger, réservations de dernière minute, voire annulations complètes.

Les entreprises touristiques, déjà malmenées par le paysage covidien et soumises depuis toujours aux aléas du climat, se trouvent encore une fois devant un défi colossal pour se maintenir à flot.

La cerise sur le gâteau

Le grand défi de l’heure ? L’IA, de son petit nom, ce phénomène à ses balbutiements mais appelé à infléchir les comportements dans tous les domaines. L’an dernier, « 38 % des répondants au sondage ont eu recours à une plateforme d’intelligence artificielle; et plus précisément, 6 % des voyageurs québécois en ont utilisé pour planifier un séjour ».

Si ce n’est déjà fait, les prestataires de services touristiques n’ont d’autre choix que de sauter dans le train en marche de cette nouvelle réalité, qui comporte des avantages indéniables malgré les enjeux de cybersécurité et de protection des données personnelles, martèlent les experts. Même si, insistent-ils, l’intervention humaine y sera toujours de mise.

Tout un bagage

Au-delà de ce valeureux Québécois nordique qui court plus vite que son ombre après le soleil et fait gonfler les statistiques des destinations chaleur, l’industrie touristique colporte tout un bagage de considérations complexes dont il faut tenir compte dans le succès d’un séjour, autant pour le consommateur que pour l’émetteur de services.

Et, au bout du compte, foin de l’inflation, des taux d’intérêt, des conflits, des désastres climatiques, de l’explosion des prix, toutes les enquêtes révèlent que, pour le citoyen, toutes classes sociales confondues, il restera toujours le voyage.

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