À propos de l'auteur : Serge Truffaut

Catégories : Jazz

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Ray Brown à gauche, Ed Thigpen au centre et Oscar Peterson au volant.

Serge Truffaut

Edward Kennedy Ellington dit Duke Ellington avait coutume de dire qu’Oscar Peterson était le « maharaja du piano ». Quant il ne soulignait pas cela, il conseillait de ne jamais s’asseoir au piano après Peterson car si tel était le cas la comparaison avec ce dernier se traduirait par la mise en miettes du quidam ayant osé défier « ze master ».

Les constats de sire Ellington ont ceci de pédagogique — oui, pédago-machin —, qu’ils mettent en relief la principale singularité du pianiste :  sa puissance. Avant comme après lui, aucun pianiste n’a été aussi puissant, aussi fort, aussi prolixe que le musicien originaire de Saint-Henri.

Tout récemment, Kelly Peterson, la veuve, a poursuivi son travail d’archiviste en livrant un nouvel enregistrement live du pianiste. Le titre ? Con Alma – The Oscar Peterson Trio – Live in Lugano, 1964 publié par l’étiquette américaine Mack Avenue. Le show en question avait été enregistré par la radio publique de la Suisse. CQFD : la qualité sonore est indéniable.

La contrebasse est entre les mains de Ray Brown qui fut une école de l’instrument à lui seul. À la batterie on retrouve Ed Thigpen. Autrement dit, nous voici en présence du trio qui enregistra son fameux Night Train à la même époque. Autrement dit (bis), nous voici en présence du meilleur trio de la longue carrière ( 67 ans) du maharaja.

Le 26 mai 1964, le programme fut le suivant : Waltz For Debby, My One and Only Love, Blues For My Landlady, Con Alma, I Could Write a Book et enfin It Ain’t Necessarily So. Tous ces morceaux ont été déclinés entre 5 et 11 minutes. On souligne cela car Peterson déploie sa virtuosité du premier accord au dernier. Un autre fait doit être rappelé.

À cette époque, le pianiste Bill Evans montait tellement en puissance qu’ici et là on comparaît les deux styles. Parfois on les opposait. À Peterson la puissance, à Evans la subtilité. Il est vrai que les deux avaient eu une éducation différente : Daisy, la soeur et prof de piano qui forma Oscar, était une farouche avocate de la discipline, du gospel et du répertoire classique.

Elle imposait à son jeune frère un minimum de 4 heures d’entraînement quotidien. Bill Evans, lui, fut formé à l’école russe du piano à laquelle sera formé également l’autre grand pianiste montréalais Paul Bley. Si au terme de ces années d’étude Evans fut rompu au répertoire classique, les tonalités du gospel, du sacré, lui étaient étrangères.

À vous de choisir. Pour notre part, on a toujours préféré les accents sonores nés sur les berges du Mississippi que ceux de la Moskova. Car on a toujours et énormément apprécié les pianistes qui écoutaient Peterson : soit les Ray Bryant, Horace Parlan, Junior Mance, Red Garland, Sonny Clark, Hampton Hawes ou Elmo Hope. Amen ! On comprend que l’école russe rassure le p’tit bourgeois, mais bon …

Cela étant, ce nouvel opus de Peterson s’ajoute, il est important de le souligner, à une série d’enregistrements radios aussi incontournables les uns que les autres et tous publiés depuis la mort du maître. Le site montréalais Justin Time propose quatre albums enregistrés par CBC alors que le site de Mack Avenue propose des albums enregistrés à Helsinki par la radio publique de Finlande et à Zurich.

Voilà, tout est dit ou presque.

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