À propos de l'auteur : Marie-Josée Boucher

Catégories : Société

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Bibliothèque présidentielle et musée Franklin D. Roosevelt

Le président Franklin Roosevelt, en compagnie de ses invités, sa cousine, Margaret Suckley, la princesse Martha, de Norvège (au centre) et le roi Georges II, de Grèce, à sa maison de Top Cottage, dans l’État de New York. Photo prise le 27 juin 1942.

De 1940 à 1945, la princesse héritière Martha de Norvège s’est exilée aux États-Unis pour fuir l’occupation allemande dans son pays. Son mari Olav et son beau-père Haakon VII ont pour leur part trouvé refuge en Grande-Bretagne. La princesse est devenue une femme d’action dans ses interventions auprès du président Franklin Delano Roosevelt pour aider son pays.

Marie-Josée Boucher

Cette histoire a donné lieu à la série télévisée Liaison influente, version française d’Atlantic Crossing. Selon le site du réseau de télévision américain PBS Masterpiece, le créateur, scénariste, réalisateur et producteur exécutif Alexander Eik a consacré près de sept ans de recherches avant de concrétiser son projet.

Liaison influente (accessible sur tout.tv.extra) souligne s’inspirer de faits réels. Elle laisse entrevoir qu’il y aurait eu une relation amoureuse entre le président américain Franklin Delano Roosevelt et la princesse Martha, ce qui n’a jamais été confirmé.

Doyenne de la communauté norvégienne 

Comment la diaspora norvégienne montréalaise a-t-elle réagi à ce volet de l’histoire de la famille royale ?

Kari-Gro Balzersen Quraeshi a émigré au Canada au début des années 1960. Elle y a suivi son époux ingénieur d’origine pakistanaise, qui avait obtenu un emploi au Québec dans le secteur des énergies renouvelables.
Jeune diplômée en enseignement, Kari-Gro Balzersen Quraeshi a d’abord pratiqué son métier dans le nord de la Norvège, avant d’aller faire une maîtrise en science aux États-Unis.

Après son arrivée au Québec, elle a obtenu un baccalauréat en sociologie à l’Université Concordia. Elle a connu une longue carrière en enseignement aux niveaux secondaire et universitaire au Québec. Elle a même enseigné en Afrique et en Asie pour le compte de l’Agence canadienne de développement international (ACDI).

Maintenant retraitée et active octogénaire, (elle aura 90 ans en juin prochain), cette mère de quatre enfants a commenté la série Liaison influente. Nous l’avons rencontrée à Pointe-Claire, dans la bibliothèque de la confortable résidence pour aînés où elle vit avec son mari. Elle avait pris soin de dresser une petite liste des points qu’elle voulait aborder.

La série télévisée

Kari-Gro Balzersen Quraeshi a tellement aimé Liaison influente qu’elle l’a vue deux fois! Elle s’est toujours intéressée à la famille royale de Norvège.
L’octogénaire a toutefois des réserves sur la prétendue attirance entre la princesse Martha et le président Roosevelt. «Je parle au nom de tous les Norvégiens : nous n’aimons pas cette supposition. Nous croyons que c’est faux qu’il y ait eu une relation amoureuse. Ils ont probablement eu de l’affection l’un pour l’autre parce qu’ils étaient tous deux sympathiques et intelligents », affirme-t-elle.

Elle dit avoir parlé à ses cousins en Norvège. Ils n’ont pas du tout aimé la série à cause de ce trait! «Je crois que le réalisateur a embelli le tout pour procurer un meilleur effet auprès des téléspectateurs », estime-t-elle.

Un mariage d’amour

« Nous savons tous, nous les Norvégiens, que le mariage d’Olav et de Martha était un mariage d’amour », précise Kari-Gro Balzersen Quraeshi.
« Ils se connaissaient depuis l’enfance et sont tombés amoureux l’un de l’autre dans leur jeunesse. »

Ils étaient également cousins germains. En effet, le père d’Olav,Haakon VII, et beau-père de Martha, était aussi son oncle, car il était le frère de la mère de Martha. Celle-ci avait épousé Charles, le frère cadet du roi Gustav V de Suède. Le couple formé par Martha et Olav a eu trois enfants : deux filles, Ragnhild et Astrid, et un garçon, Harald, l’actuel roi de Norvège.

Dans la série Liaison influente, Martha, chassée de son pays à cause de l’invasion allemande en 1940, trouve d’abord refuge, avec ses enfants, chez ses parents en Suède. Cependant, son père l’accueille très froidement, parce que le roi Gustav V, son frère, était sympathique aux Allemands.

Martha doit alors fuir de nouveau et c’est à l’invitation du président Roosevelt qui l’avait reçue, elle et son mari, à sa résidence de Hyde Park en 1939, qu’elle s’embarque pour l’Amérique. Elle y restera jusqu’à la fin de la guerre, pendant que son époux et son beau-père se réfugieront à Londres.

Autant Martha en Amérique que son mari et son beau-père en Grande-Bretagne vont déployer tous les efforts pour soutenir la Norvège et faire échec aux envahisseurs allemands.

Femme d’action

Kari-Gro Balzersen Quraeshi souligne la performance de l’actrice Sofia Helin, qui interprète la princesse Martha. L’actrice est suédoise d’origine et selon l’octogénaire, elle a tenu à apprendre le norvégien pour le rôle. « Elle a offert une très belle performance. Je crois que la princesse Martha parlait le norvégien avec un accent suédois. »

En Amérique, Martha habite d’abord à la Maison-Blanche, puis le président lui trouve une maison, Pook’s Hill, à Bethesda, en banlieue de Washington.
La princesse s’engage dans l’action pour la communauté norvégienne.
« Elle a joué un rôle qu’elle n’avait jamais rempli auparavant. Elle avait peut-être transmis ses salutations à la radio en Norvège, mais sans plus », soutient Kari-Gro Balzersen Quraeshi.

Encouragée par le président et sa femme Eleanor, la princesse a fait une tournée aux États-Unis et a prononcé des allocutions pour recueillir des fonds pour son pays.

Dans la série, elle tente à plusieurs reprises de convaincre le président de s’engager dans la guerre, mais il résiste. Puis, Franklin Roosevelt se laisse fléchir en optant pour le prêt-bail, ce qui lui permet ainsi d’aider outre-mer, tout en affichant une certaine neutralité.

L’attaque de Pearl Harbor le 7 décembre 1941 signe la fin de la politique isolationniste des États-Unis.

Toujours dans la série, le prince Olav, dont la candidature est rejetée, au début de la guerre, pour diriger l’état-major de l’armée norvégienne vit dans l’ombre de son père. Les aléas de la guerre et son éloignement de son épouse et de ses enfants l’amènent à se montrer inquiet, jaloux et à se mettre à boire. « Nous ne savons rien de tout cela. Olav devait respecter son père le roi, qui ne tenait quelquefois pas compte des opinions de son fils », répond Kari-Gro Balzersen Quraeshi.

À la fin de la série et peu avant la fin de la guerre, Haakon VII comprend que son fils a besoin d’aide. Il le nomme chef de l’état-major de l’armée. « Olav était très apprécié des soldats», relève l’octogénaire.

Dans un second volet de cet article, Kari-Gro Balzersen Quraeshi nous racontera ses souvenirs liés à la famille royale, et le rôle et la place que celle-ci occupe dans la société norvégienne.

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