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Capture d’écran
Donald Trump le soir de sa victoire.
Jean Dussault
Plus les Américains connaissent Trump, plus ils votent pour lui. Il a obtenu beaucoup plus de votes cette fois-ci qu’en 2016, un peu plus qu’en 2020.
Plusieurs ont attribué la victoire républicaine à l’habituel snobisme des démocrates envers quiconque ne vomit pas sur le candidat républicain, une suffisance qui aurait répugné au plus grand nombre.
Or, ce dédain affirmé existait aussi en 2016 et 2020 et Harris a obtenu une plus petite part du vote cette fois-ci que son parti ces deux fois-là : c’est la preuve que l’électorat ne voulait pas d’elle.
Résultat : les républicains se tapent dans le dos et se pètent les bretelles : ils ont conquis la Maison-Blanche le 5 novembre.
Bonus jouissif, ils augmentent leur majorité à la Chambre des représentants et la reprennent au Sénat.
Le sexe des votes
Comme les électeurs américains, les électrices américaines ont voté en partie sur leur perception des conditions économiques, aussi en fonction des questions sur l’immigration et selon l’accès au droit personnel sur son propre corps. Sans compter tout autre enjeu qui a pu les influencer.
Un sentiment par définition pas du tout scientifique mène à penser que la question de l’ivg/fiv a compté plus chez les femmes que chez les hommes. Mais les données indiquent que cet enjeu n’a pas modifié les intentions de vote
Dans le plus grand contexte des relations hommes/femmes, le futur 47e président des États-Unis d’Amérique a déjà expliqué devant une caméra comment séduire les femmes : « Grab them by the pussy » (1).
Une semaine après le scrutin, il est clair et net qu’une majorité claire et nette de femmes a voté contre l’homme.
En fait, 54 % des électrices américaines lui ont signifié qu’elles exècrent le personnage.
Quand même, les électrices blanches ont continué à la marge d’appuyer le candidat républicain alors que les femmes hispanos, noires et asiatiques ont voté à la majorité pour la candidate démocrate. (Aux États-Unis, personne ne s’offusque de l’identification ethnique des votes).
Les gars
Ce ne sont ni les propositions positives ni les attaques négatives qui ont scellé l’issue du vote pour la présidence, c’est, entre autres, le sexisme.
54 % des électeurs masculins américains ont voté pour Trump. Les Blancs à 55 %, et, nouvelle tendance ? 45 % des hommes latinos et 38 % de l’électorat masculin d’origine asiatique. En Géorgie et en Caroline du Nord, Trump a obtenu l’appui de 20 % des électeurs noirs.
L’hypothèse de ce billet (biais ?) est assise sur la désolante constatation que ce qui était prévisible s’est réalisé.
L’oracle Obama
Vingt-cinq jours avant le vote, Barack Obama était allé mettre des points sur des i à Pittsburgh. Le héros démocrate, qui n’a jamais fait publiquement allusion à sa couleur, a dit s’adresser à ses « frères noirs » et il a déclaré que l’intention de plusieurs d’entre eux de voter Trump « me fait penser que vous n’aimez pas l’idée d’avoir une femme à la présidence ».
Le sentiment de l’ancien président était justifié. Et partagé par Michele Obama qui a elle, aussi brassé les camarades jadis fidèles au Parti démocrate.
Un sondage réalisé fin septembre et repris par La Presse+ à la mi-octobre montrait que 70 % des Noirs avaient l’intention d’appuyer Mme Harris alors que 85 % d’entre eux avaient voté Biden en 2020.
Les organisateurs démocrates lisent eux aussi les sondages : le même jour, leur candidate a promis un programme pour aider les jeunes entrepreneurs noirs à lancer une petite entreprise.
Ce flagrant summum de clientélisme illustre que Mme Harris aussi pense que des hommes noirs aussi n’aiment pas l’idée d’avoir une femme à la présidence.
Même si ça oblige à voter pour Trump.
Un chroniqueur généralement respecté (2) a soutenu que le résultat obtenu par la démocrate Hillary Clinton en 2016 prouve qu’être une femme candidate à la présidence n’empêche pas d’obtenir une majorité de votes.
Pas faux, mais incomplet.
La couleur
L’autre côté de la médaille, il y en a toujours au moins deux, est d’une couleur différente. Comme en 2016 et en 2020, Donald Trump est particulièrement populaire chez les électeurs blancs.
La misogynie n’est donc pas exclusive aux hommes noirs et, dans le reste de l’électorat, elle s’ajoute au racisme institutionnel.
Tel que rapporté dans En Retrait en juin dernier, « il y a au Sénat américain proportionnellement deux fois moins de sénatrices que de femmes dans le pays et quatre fois moins de Noirs que leur proportion nationale.
Six fois moins de femmes noires que dans la population ».
Une femme noire d’un talent exceptionnel et d’une expérience inouïe a failli défoncer le dernier plafond de verre .
Liesse et allégresse ont choisi d’aller fêter autre chose.
Des votes, des votes
Obama avait par ailleurs fait rire les milliers de démocrates au congrès de juillet à Chicago en mimant le rapetissement des foules aux rallyes de Trump.
Or la foule, la grosse foule, la très grosse foule a voté Trump.
Ça vaut d’être répété : 11 millions de votes de plus qu’en 2016, 100 000 de plus qu’en 2020.
Du côté démocrate, 16 % de ceux qui avaient appuyé Biden en 2020 pour battre Trump n’ont pas appuyé Harris en 2024 pour qu’elle batte Trump.
La masse, la grosse masse, la très grosse masse a rejeté Harris.
Indubitable, indéniable, incontestable.
Point.
Point-bis.
Plus, ou moins
Les Pères de la Constitution américaine avaient une peur bleue, devenue rouge ?, que quelqu’un quelque part dans le pays naissant ait trop de pouvoir et trop de pouvoirs.
Ils ont imaginé un système où tout-un-chacun devrait rendre des comptes.
L’exécutif, les deux branches du législatif et le judiciaire allaient s’assurer tous les quatre que les trois autres ne feraient pas de bêtises.
À l’inauguration de janvier prochain, les quatre instances suprêmes de la nation s’abreuveront à la même auge.
Celle de Donald J. Trump.
Le jadis 45e POTUS est le futur 47e POTUS.
Avec tous les pouvoirs et l’appui, voire la vénération, de ses thuriféraires élus au deux Chambres du Congrès. Et des militants togés de la Cour suprême.
Trump a tout ce qu’il voulait parce que les Américains lui ont tout donné.
(1) « Attrape-les par la chatte »
(2) Michel C. Auger