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L’enjeu de la guerre à Gaza et au Liban a pu jouer un rôle dans la campagne présidentielle au Michigan et la seule personne de descendance palestinienne à siéger à la Chambre des représentants a été réélue. Rashida Tlaib, démocrate et musulmane, entamera son quatrième mandat au Congrès.
Les électeurs du Michigan ont fait pivoter leur État, longtemps démocrate, dans le camp des républicains. Ils se sont comportés comme cinq autres États pivots. Kamala Harris a perdu le Michigan par plus de 80 000 votes. Beaucoup d’électeurs ont déserté les bureaux de scrutin et négligé le vote par la poste. Mais peut-être pas pour les mêmes raisons que celles qui ramènent le candidat républicain à la Maison Blanche, avec un peu plus de 50 % du vote.
Dorothée Giroux
Les bénévoles et travailleurs d’élection voyaient ce qui s’en venait, bien avant que les électeurs se présentent au bureau de vote. Le Michigan semblait opter pour un réalignement politique. Après avoir voté pour Joe Biden en 2020, l’État des Travailleurs unis de l’automobile qui ont fait la pluie et le beau temps pendant des décennies, pouvait se laisser tenter par Donald Trump. Comme les électeurs de l’État l’avaient fait en 2016, mais avec moins de 11 000 voix de différence entre le républicain et sa rivale démocrate, Hillary Clinton.
En 2024, les électeurs estiment que leurs finances personnelles sont moins bonnes qu’il y a quatre ans. Le coût de la vie a augmenté, l’épicerie est plus chère, le logement inabordable. C’est ce qu’ont dit 45 % des électeurs à leur sortie des bureaux de vote. En novembre 2020, seulement 15 % d’entre eux mentionnaient la hausse du coût de la vie comme facteur important dans leur choix de candidat présidentiel.
L’autre grande démarcation entre les deux dernières élections présidentielles au Michigan, c’est le vote à Dearborn, proche banlieue de Détroit, ville natale de Henry Ford. L’agglomération abrite les bureaux de la direction internationale de Ford ainsi que l’usine d’assemblage des pick-up de la série Ford F-150 et des anciennes Mustang.
À la présidentielle de 2020, près de 70 % des électeurs de Dearborn ont voté pour les démocrates. Cette année, un peu plus de 40 % d’entre eux ont choisi les républicains. Un déficit de près de 30 % pour Kamala Harris, dans un secteur important du Michigan.
Économie ou protestation contre la guerre
Dearborn, ce n’est pas que l’industrie de l’auto. C’est la ville où vit la plus grande communauté arabo-américaine des États-Unis. Ils et elles seraient 300 000 au Michigan, de descendance palestinienne, libanaise ou irakienne. Le président du club démocrate de Dearborn a estimé que moins de la moitié de ces électeurs seraient restés dans le camp démocrate. Les autres auraient soutenu Donald Trump ou Jill Stein, candidate d’un troisième parti. Ou ne sont pas allés voter.
Peut-être un geste de protestation contre l’administration Biden qui soutient financièrement la guerre qu’Israël mène à Gaza depuis plus d’un an et qui s’étend maintenant au Liban. Les républicains ont tenté de gagner des points avec cet enjeu, en envoyant textos et messages à des dizaines de milliers d’Arabo-Américains du Michigan en qualifiant Donald Trump de président pour la paix. Des résidents ont aussi vu un camion, circulant dans les rues de Dearborn, couvert d’immenses affiches avec des slogans liant Kamala Harris et la guerre au Proche-Orient. Certains électeurs du Michigan reprochent aussi au parti d’avoir refusé de faire entendre un orateur palestinien à la grande convention démocrate du mois d’août à Chicago.
Rashida Tlaib réélue
Si l ’enjeu de la guerre a pu jouer un rôle dans la campagne présidentielle au Michigan, la seule personne de descendance palestinienne à siéger à la Chambre des représentants a été réélue. Rashida Tlaib, démocrate et musulmane, entamera son quatrième mandat au Congrès. Elle se décrit comme « une combattante, capable de se tenir devant des milliardaires et des compagnies qui profitent de nos communautés et qui détournent notre gouvernement ». Elle a obtenu 69,7 % des voix. Elle représente non seulement la plus importante communauté arabo-américaine aux États-Unis mais également des communautés juives du grand Détroit.
Après les attaques du 7 octobre 2023 du Hamas, qui ont tué 1200 personnes et fait 240 otages, Rashida Tlaib a voté contre une résolution de la Chambre des représentants qui condamnait le Hamas et réaffirmait l’envoi de plus de trois milliards de dollars en assistance militaire à Israël.
À peu près au même moment, plus de 2000 personnes se rassemblaient à une importante synagogue de son district pour une collecte de fonds organisée par la Fédération juive du grand Détroit afin de fournir de l’aide humanitaire à Israël. Rashida Tlaib a continué à s’opposer à des décisions du président Biden, en mettant entre autres une vidéo sur les réseaux sociaux dans laquelle elle l’accusait « d’appuyer le génocide du peuple palestinien ».
Démocrates et républicains de la Chambre des représentants ont adopté une motion de censure contre Rashida Tlaib pour ses déclarations controversées au sujet de la guerre qui a fait plus de 40 000 morts à Gaza. Censure ou pas, les électeurs de son district du Michigan ont décidé de lui donner un autre mandat