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Serge Truffaut
La découverte musicale de l’année, voire des dernières années, a pour nom propre Coltrane. John de son prénom, évidemment. De quoi s’agit-il ? D’un enregistrement «assigné à résidence» dans le sous-sol d’un bungalow de Seattle pendant 60 ans. Le programme? L’interprétation intégrale de son chef-d’œuvre dans un club de la ville baptisé Penthouse, et que la maison de disques Impulse! vient tout juste de publier sous le titre A Love Supreme – Live in Seattle.
Drôle d’histoire que celle-ci. Du 27 septembre au 2 octobre 1965, Coltrane se produisit donc au Penthouse. La première partie de la soirée avait été assurée par Joe Brazil, un saxophoniste du coin qui avait l’habitude d’enregistrer différents spectacles. Ce fut le cas le 2 octobre. Bien.
Brazil rangea les bandes dans un carton et, aussi stupide que cela puisse paraître, les oublia. Plus de cinquante ans plus tard, sa femme, Virginia, demanda à un autre saxophoniste local, Steve Griggs, de faire l’inventaire des bandes et cassettes laissées par son mari, décédé en 2008.
Griggs fit la découverte que l’on sait. Il alla frapper à la porte du labelhistorique de Coltrane, Impulse!. Les ingénieurs nettoyèrent les bandes et remixèrent le tout, avec d’autant plus de ferveur qu’il n’existait qu’un autre enregistrement public du canon signé Coltrane, qui se trouvait à Antibes, en France.
La version proposée aujourd’hui a ceci de remarquable qu’elle met en relief l’esprit musical de Coltrane cette année-là. En 1965, il était boulimique, le Coltrane. Au cours des mois précédents, il avait donc enregistré A Love Supreme, puis Ascension, qui reste le manifeste du free jazz et Kulu Sé Mama.Il avait aussi composé les morceaux qui sortirent sous le titre de Méditations quelques mois plus tard.
Cette boulimie découlait avant tout d’une quête, aussi spirituelle que philosophique. Une quête constante. Après les débordements «alchimiques» des années 1950, Coltrane était devenu un janséniste obsédé par la musique et par la lecture de livres sur les religions du monde, sur la philosophie et sur les… mathématiques ! Bref, il était devenu un encyclopédiste.
À la différence de ses grands contemporains Miles Davis et Charles Mingus, Coltrane n’a jamais été un fort en gueule. Là où les premiers manifestaient avec raison leur colère, lui exprimait la révolte que lui inspiraient les effets concrets du racisme par le truchement de la tristesse et du désespoir.
Ceci explique cela : sur scène, il prolongeait pendant des minutes les pièces gravées antérieurement. À Seattle, il était accompagné du quartet historique — Jimmy Garrison à la contrebasse, McCoy Tyner au piano et Elvin Jones à la batterie —, augmenté de trois musiciens des environs.
Mais il y a surtout ceci : par saxophone interposé, il disserta sur l’assassinat de Malcolm X en février 1965, sur les 34 personnes tuées dans le ghetto de Watts, à Los Angeles, au mois d’août de la même année et sur l’augmentation plus importante que jamais des troupes américaines au Vietnam, décrétée par Lyndon B. Johnson à l’automne 1965. Ce Live in Seattle, c’est avant tout cela.
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Pour cause de COVID-19, le jazz, comme les autres arts de la scène, s’est mis entre parenthèses. Une fois cette lapalissade rappelée, reste tout de même ceci : des clubs disséminés ici et là sur le continent se sont employés à proposer des spectacles. On devrait préciser : de sacrés bons spectacles!
Histoire de se retrouver, on conseille vivement d’aller à la section jazz du site InstantSeats (instantseats.com), qui n’est rien de moins que le courtier de 55 boîtes de jazz à travers les États-Unis, dont le Keystone Korner de Baltimore, le Blues Alley de Milwaukee et le Smoke Jazz Club de New York.
Sinon? Rien de mieux que de s’abonner au Small’s de New York. Pour 10 $ par mois, vous pouvez voir et entendre les excellences musicales de notre époque en plus d’avoir accès aux centaines de spectacles archivés depuis une dizaine d’années.
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Le 1er novembre dernier, le guitariste Pat Martino est décédé. Il avait 77 ans. Sa réputation, c’est bien simple, était la suivante : il était un musicien pour musiciens («a musicians’ musician»). Et ce, malgré un accident cérébral qui lui avait fait perdre la mémoire en 1980 et qui l’avait obligé à réapprendre à jouer pendant une dizaine d’années. Il a enregistré plus d’un album pour Blue Note.
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Pendant des décennies, le saxophoniste Wayne Shorter avait rêvé d’écrire un opéra consacré à ce vieux mythe de l’Antiquité grecque qu’est Iphigénie. Au cours des huit dernières années, il s’est attelé à la tâche avec l’aide de la contrebassiste Esperanza Spalding. Note : le décor de l’opéra a été conçu par l’architecte Frank Gehry.
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La majorité des musiciens de jazz ont leur site. Ce qui constitue évidemment une source d’informations particulièrement riche. Mais s’il fallait accorder la palme au site incontournable, alors celui du pianiste Ethan Iverson ([email protected]) l’emporterait haut la main, car il est tout simplement génial. Les analyses et surtout les entrevues d’Iverson avec ses collègues, dont une avec le pianiste Marc-André Hamelin, sont exceptionnelles.