À propos de l'auteur : Jean Dussault

Catégories : Société

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Jean Dussault

Jean Dussault

L’évolution, la mode ou la politique changent le langage. Même la langue.

Par exemple, le terme « sexe »  est maintenant, littéralement, ambivalent.

Des mots jadis aussi simples que « genre » sont devenus moins nets.

« Droite » et « gauche » ont aussi suivi, voire subi des cours de ré-orientation.

Dans l’édition papier 2017 du Petit Robert, il y a cinquante pages de mots qui « commencent par ‘n’ ». La liste inclut nage, naïf, nègre, neige, nem, néné, nénette, nerd, nier, niet, nœud, noir, non, nul, nunuche.

Plus ou moins cinq cents mots commencent par « n » dans ledit dictionnaire. Le mot maudit est à la page 1681.

Des sigles menteurs

L’IDU est un déguisement.

L’Institut du Développement Urbain ne regroupe pas des urbanistes qui espèrent imaginer, viser et atteindre un milieu sociétal convivial et environnemental qui tienne compte des différentes composantes socio-économiques qui animent la vitalité structurante et touchante créée par l’apport des groupes divers, mais singulièrement intéressants, qui rêvent de collectivement partager le lieu de leur mieux-vivre.

Cet émouvant objectif appartient plus à l’UQAM qu’à l’IDU.

Parce que l’Institut du Développement Urbain, ma chère, c’est en fait l’association des promoteurs immobiliers

Rien de grave, rien d’offensant, rien de gênant.

Mais, mais c’est comme si le mot « promoteur » commençait pr un « n ».

Faudrait pas le prononcer.

L’IPP itou

L’Institut des Produits Pétroliers ne regroupe pas des chimistes qui testent, analysent et peaufinent l’ultime recette qui combinera efficacité productive et soulageant répit aux défis réchauffamatiques qui confrontent maintenant et menaceront bientôt.

Cette noble intention appartient plus à la science-fiction qu’à l’IPP.

Parce que l’Institut des Produits Pétroliers, mon cher, c’est en fait l’association des producteurs de pétrole.

Rien de grave, rien d’offensant, rien de gênant.

Mais, mais c’est comme si le mot «producteur » commençait pr un « n ».

Faudrait pas le dire.

Les mystères des ministères

L’élection de la Coalition Avenir Québec en octobre 2018  a changé le monde étymologique de la nation, sinon du pays : le MIDI est devenu le MIFI. Ça a pris six mois, c’est de même, pour que le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion devienne le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration.

L’honnête citoyen notera là l’orientation différente, voire divergente, entre le bref gouvernent de M. Couillard  et le dorénavant essoufflé gouvernement de M. Legault.

Le sceptique contribuable cherchera par ailleurs les résultats des efforts officiels de Francisation et d’Intégration promus et promis par le re-nommé ministère.

Le MTMDET

Le ministère des Transports a été un temps le ministère de la voirie, puis celui des transports et de la voirie, puis celui des transports, de la mobilité durable et de l’électrification des transports, le célèbre MTMDET sus-mentionné, pour revenir au modeste ministère des Transports et de la Mobilité durable.

Une fichue quête d’identité.

À la recherche d’un cône orange ?

D’un troisième lien ?

OTTAWOKE

La créativité nomenclaturale de ce qui sert de gouvernement canadien mérite elle aussi une médaille orange.

« Affaires mondiales Canada » est, au minimum, prétentieux. Guère mieux, la formulation est la misérable illustration du « federal french ».

AMC n’est pas un accident linguistique selon Ottawa.

Plus, ou moins, le gouvernement qui ne réussit pas à organiser son service de paie depuis des années placarde un department qui prétend s’occuper de l’ensemble de l’univers.

Existent aussi le ministère des Finances Canada, de la Sécurité publique Canada, de Transports Canada. De Revenu Canada.

Toutes des affiches du Canada dans le pays où l’actuel premier ministre affirme

que nous, qui ça ? sommes dans une ère post-nationale.

L’oreille sensible entendrait la dissonance, l’oeil attentif verrait l’aberration.

L’offuscation environnementale

Il existe au Canada un MECCC. Ou, dans la langue qui compte : the DECCC.

Illustration que les deux langues officielles, pour autant qu’elles le soient encore, traduisent le même objectif, le MECCC est, dans sa construction grammaticale, le ministère de l’Environnement et du Changement Climatique Canada. Donc syntaxiquement en faveur de l’environnement et du changement climatique.

Tout comme the Department of Environment and Climate Change Canada mène bravement/bravely le même combat pour une chose et son contraire.

Exemple flagrant du bilinguisme canadian, le « Climate Change » anglo claudique en « Changement Climatique » franco-fédéral.

Il n’y a que dans la capitale du Canada que personne ne sait que, dans la langue de Leclerc et de Vigneault, il n’y a pas qu’un seul Climate Change qui menace la nation et le monde. Ben non, grosse nouvelle, ‘ « breaking news in Toronto », il y a sur cette multilingue planète des changements climatiques.

Not in/pas dans Ottawa, not in/pas dans Canada.

L’environnement distinct

Ouf, quelqu’un ou quelqu’une quelque part dans une officine gouvernementale québécoise a, ciel, imaginé le MELCCCFP. : Le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs.

Certes, l’objectif de l’élégance nominative n’a pas été atteint dans l’exercice lexical, et peu connaissent le résultat de la démarche environnementale du gouvernement québécois

Reste que les mots manquent pour exprimer le soulagement, même la gratitude, de voir un ministère expliquer aux contribuables de quoi il s’occupe.

Personne ne sait ce que ça donne, mais tout le monde sait ce que ça veut dire.

L’île distincte

Bienvenue à Montréal. Ou dans sa ville ou son agglomération ou son île.

Où le 911 mène au SIM ou au SPVM.

Encore des sigles menteurs.

Le « Service de sécurité incendie de Montréal » ne s’appelle pas le SSIM, mais le SIM, comme dans « Service des incendies de Montréal ». Ce qui en ferait l’endroit où le contribuable appelle quand il veut allumer, et non pas éteindre un feu.

Autre incongruité nominale, le SPVM. En toutes lettres, cela signifie le «Service de Police de la Ville de Montréal». Et bien non! Puisque, comme ceux des pompiers d’ailleurs,  ses services s’étendent à ce qui s’appelle l’agglomération de Montréal, de Montréal et  ses 15 villes avoisinantes dans l’île de Montréal.

Au nom de la vérité, ou en tout cas de la sacro-sainte transparence, le SIM devrait s’appeler le SSIIAM et le SPVM le SPIAM.

Et Projet Montréal, le parti de la mairesse Plante, deviendrait Projet Île Montréal,  Projet Agglomération Montréal.

PIMPAM.

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