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Marjorie Tayler Greene et George Santos
Serge Truffaut
Le 7 février dernier, le Congrès des États-Unis a été le théâtre de la pièce qui s’y joue année après année sous le titre Le Discours sur l’état de l’Union. Comme c’est toujours le cas, les travées du lieu étaient occupées par les élus des deux partis attendant l’arrivée du président Joe Biden. Au milieu d’entre eux et de leurs conciliabules, une scène inusitée a retenu l’attention car elle révélait une sévère opposition entre deux républicains : le sénateur Mitt Romney et le représentant George Santos.
Alors que ce dernier faisait le beau sur le devant de la scène en caressant l’espoir de serrer la main du président sous l’oeil des caméras, Romney l’apostropha en lui signifiant que c’était une honte de le voir là. Qu’il devrait aller au fond de la salle et adopter profil bas. Mieux, qu’il devrait quitter, de dire en substance, le sénateur de l’Utah, les lieux sacrés de la démocratie américaine et ne jamais y revenir.
Il faut préciser que depuis que Romney a voté en faveur de la mise en accusation de Trump, il est considéré comme le républicain ayant l’inclination morale la plus prononcée. À bien des égards, il est à sa formation politique ce que John McCain fut hier : une conscience éthique.
Dans les heures qui ont suivi cette altercation et suite aux propos tenus par Romney auprès des journalistes après coup, les chaînes d’information continue, Fox exceptée évidemment, ont disserté sur cet échange et surtout permis à des commentateurs républicains de s’exclamer :« Enfin ! ». Car Romney venait de dire ce que la majorité des républicains pensent tout bas, soit que Santos est une honte.
Les mensonges de l’ado
D’origine brésilienne, l’élu new-yorkais Santos a déployé tout au long de sa vie une affection sans borne pour le mensonge s’accompagnant, on s’en doute, d’une indifférence bien trempée à l’endroit de l’honnêteté. À la différence d’un Nixon, ses mensonges ne se sont pas cantonnés à la sphère politique. Ils ont rythmé toutes les étapes de sa vie. À telle enseigne, que l’on doit souligner que chez lui la pensée loge toujours à l’enseigne de la puberté.
À preuve ceci : il s’est dit descendant de juifs ayant fui l’Holocauste, sa mère a été tuée lors des attentats du 11 septembre, il est diplômé de la New York University et du Baruch College, il a été conseiller financier au sein de Goldman Sachs et autres, il s’est dit favorable à la loi anti-gai introduite par le gouverneur Ron de Santis en Floride, alors qu’il a participé, de révéler ses petits amis, à des concours de drag-queens au Brésil ….
On fait l’impasse sur les dizaines d’autres mensonges pour mieux retenir qu’au Brésil il est le sujet d’une poursuite pour production de chèques sans fonds, qu’il a fraudé les Hamish de Pennsylvanie par animaux de compagnie interposés ainsi que certains vétérans. Bref, il est malhonnête sur tous les fronts.
Le parti de la honte
Il est menteur et escroc et pourtant il reste maintenu à son poste. Il en va ainsi parce que Kevin McCarthy, dont certains républicains disent à mots couverts qu’il est une faiblesse intellectuelle, le maintient. Non seulement ça, il l’a nommé sur deux commissions. Mineures il est vrai, mais quand même …
La réalité de cette situation ubuesque se résume en bonne partie par un nom propre : Marjorie Taylor Greene. En bonne militante des inventions scabreuses de la nébuleuse favorite des complotistes, soit Qanon évidemment, cette représentante de Georgie est l’autre grande menteuse du Parti républicain. Qui plus, est raciste et antisémite.
Selon elle, les incendies en Californie ont été provoqués par des lasers manipulés par des juifs, aucun avion ne s’est planté dans l’édifice du Pentagone en septembre 2001, et il n’est même pas sûr que les attentats ont été conçus par Al-Qaïda. Même sur la Covid, elle s’est fait la championne des inepties formulées par des incultes en comparant notamment les recommandations du docteur Anthony Fauci aux règles antisémites imposées par les nazis en leur temps.
Elle est comme ça, et pourtant la voilà bras droit de Kevin McCarthy speaker et donc troisième personnage le plus important du paysage politique. Car c’est vraiment grâce à elle et plus exactement à son rôle d’intermédiaire avec les autres cinglés et menteurs du parti, principalement Matt Gaetz et Lauren Boeber, qu’il a été nommé chef de file des républicains à la Chambre. Et ce, même si le chef de file des sénateurs républicains Mitch McConnell a qualifié les affirmations de Marjorie Taylor Greene de « stupidités ».
Histoire de la récompenser, McCarthy l’a nommée au sein de la puissante Commission de la sécurité intérieure. Rien de moins.
La conclusion est d’autant plus simple, qu’elle commande la communication d’un constat à jamais intemporel et signé Michel Audiard : « Les cons, ça osent tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît.»